La lumière révèle les reliefs et les jeux de textures des différents états du plastique. Dans les irrégularités de ce matériau, s'engouffrent les rayons lumineux, jusqu’à donner vie et mouvement à une matière pourtant inerte.
LouiSimone Guirandou Gallery est heureuse de vous présenter « De la lumière naît la matière », une exposition collective réunissant Dramane Bamana et Richmond Tehe du 8 décembre 2022 au 28 janvier 2023.
Né en 1996 à Bougouni (Mali), Dramane Bamana est diplômé du Conservatoire des Arts et Métiers Multimédia. Membre actif du collectif Tim’Art, il vit et travaille à Bamako. Richmond Tehe est né à Zorofla (Côte d’Ivoire) en 1997. Il obtient son diplôme d’Etudes supérieures artistiques (Master II, option Peinture) de l’Ecole nationale des Beaux-Arts d’Abidjan en 2022. Il vit et travaille à Bassam, près d’Abidjan.
Les deux artistes mettent en lumière les possibilités offertes par la matière plastique et son caractère envahissant. Ce matériau synthétique tire d’abord son nom du pouvoir de modeler et de la beauté des formes. La richesse du plastique réside dans ses propriétés infinies et variées : des couleurs chatoyantes à la transparence, de la souplesse à la solidité, de la fragilité à la résistance. Dramane Bamana et Richmond Tehe exploitent ce potentiel jusqu’à faire de la matière, le sujet de leurs œuvres. Ils la confrontent à l’usure du temps ou au feu, autant d’éléments aux effets incertains qui rappellent à l’artiste que la matière lui échappe autant qu’il la maîtrise.
La lumière révèle les reliefs et les jeux de textures des différents états du plastique. Dans les irrégularités de ce matériau, s'engouffrent les rayons lumineux, jusqu’à donner vie et mouvement à une matière pourtant inerte. Ainsi, les personnages qui s’y dessinent semblent se mouvoir et évoluer au fil du temps, au rythme des lueurs et des éclaircies.
Dramane Bamana représente des scènes de genre à partir de plastique récupéré. En le recyclant, l’artiste se fait le porte-parole de la lutte contre l’insalubrité engendrée par la pollution plastique. Paradoxalement, brûler le plastique permet en apparence de s'affranchir de la pollution mais dégrade en réalité la qualité de l’atmosphère. Dans ses toiles, Dramane soumet lui aussi ce matériau au feu, et manifeste ainsi la douleur engendrée par ce cycle infernal dont la population semble ne pouvoir se défaire.
Mais Dramane Bamana transmet également un message d’espoir, lequel transparaît d’abord en arrière-plan, à travers le fin grillage que laisse apparaître la matière fondue. Ce grillage souple agit comme un support solide pour la matière et comme un lien fraternel entre les membres d’une communauté. La vie de cette dernière est représentée à travers des scènes du quotidien d’abord photographiées, que l’artiste traduit ensuite sur la toile. Dramane y loue l’humilité et la fraternité qui unissent la communauté face à l’adversité et ses personnages sans visage donnent à ces scènes de quartier, une portée bien plus universelle. L’artiste nous invite ainsi à plonger dans l’univers paisible d’un quotidien ordinaire que chacun est en mesure de s’approprier.
Richmond Tehe laisse apparaître l’armature de son dessin sans en dévoiler le secret. Loin de dissimuler ses lignes directrices, il met en valeur son geste à travers des hachures assumées. Chez Richmond, le trait n’est pas seulement le fondement du dessin que l’on vient recouvrir, mais également la finalité de son identité artistique. Ses lignes enchevêtrées semblent tisser un nid, à la fois hostile et fascinant, au milieu duquel surgit un portrait. Dans ce fragile équilibre, chaque ligne risque de bouleverser l’expression de ces visages au regard perçant, portraits de ses états d'âme.
Pour sa série « Fragilité », Richmond travaille à partir de nattes en plastique, surface tissée et colorée où la communauté se rassemble, se retrouve ou se repose. L’artiste investit la natte et s’approprie son esthétique en mêlant les lignes des visages aux couleurs du tissage. Il soumet ensuite son dessin à la liberté des flammes qui transforment la matière plastique. Richmond oriente minutieusement la brûlure aux abords de son dessin jusqu’à former une fine dentelle synthétique laissant apparaître le support en bois. La toile subit ensuite entailles et incisions, dévoilant les strates qui composent ces portraits en apparence déstructurés. De ce corps-à-corps incertain avec la matière émerge une grande fragilité, vulnérabilité que le regard inquisiteur de ses personnages semble aussi déceler au fond de nous.